Physical Address

304 North Cardinal St.
Dorchester Center, MA 02124

Le Festival du cinéma américain de Deauville fait sa mue post-#metoo

La pluie a vidé la plage et détrempé le tapis rouge qui mène à la salle de cinéma. Les mouettes tournent orphelines en essuyant les rafales de vent, mais au bar du Normandy, l’hôtel amiral du groupe Barrière, grand mécène du Festival du cinéma américain de Deauville (Calvados) – qui se tient jusqu’au 15 septembre –, on se félicite : les Américains, justement, sont de retour.
Après les années Covid-19, la grève des scénaristes puis des acteurs à Hollywood, en 2023, avait tenu éloignés une fois de plus les grands noms qui foulent les planches de la station balnéaire normande depuis un demi-siècle.
Voici donc que débarquent Michael Douglas, James Gray, Michelle Williams, Natalie Portman, Francis Ford Coppola, Daisy Ridley (britannique, mais star de Star Wars), Sean Baker – le réalisateur d’Anora, Palme d’or à Cannes – et son actrice Mikey Madison, Malia Ann (alias Obama, fille de l’ancien président des Etats-Unis, venue présenter son court-métrage, The Heart), Sebastian Stan (Captain America)… Sans compter les cinéastes encore peu ou pas connus des films présentés en compétition.
Tout a commencé en 1974, lorsque Lionel Chouchan, publicitaire – et normand –, et son ami André Halimi (1930-2013), critique de cinéma, proposent leur projet de festival de cinéma au maire de Deauville, Michel d’Ornano (1924-1991). Comme l’écrit aujourd’hui la femme de l’ancien ministre, Anne d’Ornano, en introduction d’un livre de Gilles Penso, Deauville, 50 ans de cinéma américain (Michel Lafon, 176 pages, 35 euros), « Michel a tout de suite aimé l’idée, mais, prudent, il a demandé à Claude Lelouch et Philippe Labro ce qu’ils en pensaient. Les deux étaient enthousiastes ». Le 2 septembre 1975, l’histoire commence. Avec Nashville, de Robert Altman, Guerre et Amour, de Woody Allen, Jonathan Livingston le goéland, de Hall Bartlett…
Une 50e édition, donc. Qui marque aussi un tournant. Car il manque notoirement un nom dans ce livre mémoriel publié en août : celui de Bruno Barde. L’homme dirigeait pourtant le festival depuis trente ans, depuis que Lionel Chouchan lui en avait donné les rênes, en 1995. Le directeur a été relevé de ses fonctions à la mi-juin, en attendant les conclusions d’une « enquête interne » après la publication par Mediapart d’une série de témoignages le mettant en cause. Sept jeunes collaboratrices y dénoncent des comportements s’apparentant à du harcèlement sexuel : gestes déplacés, propos machistes, propositions inconvenantes. Aucune plainte n’a été déposée, l’intéressé nie, mais l’organisation n’a pas hésité à lui demander de se mettre aussitôt en retrait.
Il vous reste 74.45% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

en_USEnglish